Sortir de l’euro

Pour le chef de file de Debout la République, Nicolas Dupont-Aignant, l’absence de véritable confrontation entre représentants politiques sur le sujet (l’Euro) est aussi due au fait que l’euro est devenu un dogme, une croyance : on assimile l’euro à l’Europe et l’Europe à la paix. On est donc sommé d’y croire… Dupont-Aignan note d’ailleurs que l’argumentaire des proeuro a changé. Comme si la foi des fidèles commençait à s’éroder : Ce n’est plus « l’euro, çà marche », mais « si on en sort, c’est la catastrophe ». (…) Et va plus loin : les banques, elles aussi, ont intérêt à étouffer le sujet : « il ne faut pas sous-estimer leur poids dans cette histoire. D’ailleurs, beaucoup de gens dans les milieux d’affaires, au sein de l’oligarchie, beaucoup d’économistes sont pour la sortie de l’euro. Mais ils ne peuvent pas le dire publiquement, sinon les banques mettraient fin à leurs contrats. »
(…)
Du coté de la gauche de la gauche, on sait aussi enterrer discrètement les débats. A en croire Jacques Généreux, l’économiste en chef du parti de gauche, « les dirgeants comunistes n’ont pas voulu entendre parler de rupture avec l’euro. Ils ne voulaient pas fâcher les socialistes et perdre des postes en échange, confie-t-il à Marianne, c’est pourtant ce qu’on aurait dû mettre dans le programme du front de gauche. On aurait dû écrire noir sur blanc : si les négociations avec nos partenaires de l’union pour refonder le projet européen n’aboutissent pas, s’il n’est pas possible de redonner de l’autonomie à la banque de France sans sortir de l’euro, alors oui, in fine, nous n’hésiterons pas à sortir de l’euro. » Mais « Méluche » n’a jamais eu l’occasion de défendre ce que Généreux appelle « la stratégie du coup de force », ses propres alliés communistes ayant réussi à lui tordre le bras ! « C’était un défaut majeure de notre programme à la présidentielle », regrette Généreux.

Extraits d’un article de Gérald Andrieu dans Marianne du 31 janvier 2014.

Vers 2009, influencé par la lecture d’économistes « mainstream » comme Xavier Timbeau et Patrick Artus, j’admets que l’Allemagne est sur une trajectoire nationaliste et utilise l’euro pour détruire ses partenaires. Nous devons sortir de ce rapport monétaire sadomasochiste avec l’Allemagne.
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Une sortie de l’euro provoquerait certes une désorganisation temporaire mais, surtout, des effets économiques bénéfiques et rapides, avec en prime une révolution sociale, le nettoyage d’élites mal formées, vieillissantes, archaïques, quelque chose de comparable à ce qui s’est passé en 1945.
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Vu de Washington, de Tokyo ou de Berne, la zone euro est le trou noir de l’économie mondiale, l’un des deux grands facteurs dépressifs planétaires, l’autre étant l’excédent commercial chinois. Les Etat-Unis, la Grande-Bretagne, le Japon font des politiques de relance monétaire et regardent d’un air navré l’euro, cette construction archaïque, qui interdit toute relance monétaire à la France.
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Le verrouillage de la question monétaire par les oligarchies partisanes crée un sentiment d’impuissance. Le Front national, dont la fonction est en fait de sécuriser le système, souille toutes les solutions économiques raisonnables. Mais les élections européennes nous offrent un puissant moyen d’action. L’idéologie européiste a mis en place une institution bidon, le Parlement européen, feuille de vigne du pouvoir réel. Le Parlement se prétend incarnation de la démocratie au moment même où la machine européenne devient la domination implacable des petites nations du Sud par les nations plus puissantes situées au Nord. Les députés européens ne servent à rien, même s’ils sont eux-même très motivés pour être élus : une mandature de cinq ans çà ne rien faire, rémunérée 10000 € par mois (impôts déduits, primes intégrées) leur permettra d’acheter un appartement ou une maison de campagne. Les citoyens français peuvent refuser d’entrer dans ce jeu dégradant. S’abstenir, ce sera voter à la fois contre les partis européistes et contre le FN. Au-dessus d’un certain niveau, le taux d’abstention vaudra référendum. Le ridicule tuera l’idéologie.

Extraits d’un entretien d’Aude Lancelin, journaliste pour Marianne, avec Emmanuel Todd dans Marianne du 31 janvier 2014.

Les chantres de la monnaie unique (…) ont menti aux Européens : ni la croissance ni l’emploi n’ont été au rendez-vous, sauf en Europe rhénane. (…) une monnaie unique dans une zone où les économies ont des niveaux de productivité différents aboutit progressivement à la capture de la production de richesses par la zone la plus développée. (…) L’euro a ruiné l’Europe du Sud : elle est incapable de vivre avec une monnaie forte, son industrie ou son tourisme en pâtissent trop. La prétendue reprise espagnole s’effectue avec un jeune sur deux au chômage ! L’Italie et la France crèvent à feu continu d’une surévaluation de l’euro par rapport aux grandes monnaies du monde et ne peuvent plus compenser leur écart de productivité avec l’Europe rhénane par des dévaluations. Dans quelques années nous serons « à poil ». Et lorsque les citoyens comprendront que les élites européennes les ont ruinés avec l’euro au profit de l’Europe du Nord, ils se révolteront, mais il sera trop tard… (…) Combien de millions de chômeurs devrons-nous accepter avant qu’un politique n’ait enfin le courage de tuer cette funeste monnaie ?

Extraits d’un entretien d’Emmanuel Lévy, journaliste pour Marianne, avec Philippe Villin dans Marianne du 31 janvier 2014.

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