Pourquoi vous devriez vous informer autrement ? La réponse dans cette vidéo.
Transition vers la catastrophe
La transition énergétique est sur toutes les lèvres, figure dans quasiment tous les programmes politiques et est même plébiscitée par l’industrie. Telle qu’elle est menée, elle aurait pourtant plutôt tendance à accélérer la catastrophe. Explications.
[…] Eurostat nous apprend que « les énergies renouvelables ont battu des records en Europe » en 2023, leur part de l’électricité produite dans l’Union Européenne (44 %) dépassant largement celle des fossiles (33 %). Au niveau mondial, les renouvelables atteignent près de 15 % du mix énergétique. On a envie d’y croire : encore cinq-six fois ça et on atteindra le 1oo % renouvelables, non ?! Et ainsi se diffuse la petite berceuse de la croissance verte et du développement durable.
[…] L’historien Jean-Baptiste Fressoz fait sonner le réveil. Dans son livre Sans Transition, il raconte « une nouvelle histoire de l’énergie permettant de comprendre l’étrangeté radicale de la notion de transition. Au lieu de présenter la succession des systèmes énergétiques au cours du temps », il explique pourquoi « toutes les énergies primaires ont crû de concert et pourquoi elles se sont accumulées sans se remplacer ». Dans le grand gâteau de la production d’énergie, en effet, les renouvelables se taillent une portion de plus en plus importante. Le problème, c’est que dans le même temps, le gâteau ne cesse de grossir. Résultat : en 2023, nous n’avons certes jamais produit autant d’énergies renouvelables, mais nous n’avons jamais cramé autant de charbon non plus ! idem pour le pétrole ! C’est une question de présentation : les malins transitionnistes mettent en avant le fait que les énergies fossiles baissent en valeur relative… pour mieux cacher qu’elles augmentent en valeur absolue.
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Ce à quoi nous assistons actuellement n’a rien d’une « transition » : il s’agit d’une « expansion symbiotique » du système énergétique.
Cette analyse nous fait voir l’annonce de Microsoft d’un autre œil. Quand bien même l’entreprise ouvrirait une ferme de panneaux solaires, ceux-ci alimenteraient un nouveau « besoin » au lieu de faire baisser la consommation de charbon, de pétrole, de gaz naturel ou de nucléaire. De plus, la construction de ces panneaux solaires exigera l’utilisation d’énergies fossiles pour extraire des matières premières, assembler le tout, puis acheminer les panneaux jusqu’à leur lieu d’implantation. Ils fourniront alors de l’électricité à un site comprenant espace de stockage de données et supercalculateur énergivores, dont on s’était très bien passé jusque-là. Au final, l’énergie de ces panneaux, toute renouvelable qu’elle soit, ne fera que renforcer un capitalisme destructeur. « La transition est l’idéologie du capital au XXIe siècle, tranche Fressoz. Grâce à elle, le mal devient remède, les industries polluantes, des industries vertes en devenir, et l’innovation, notre bouée de sauvetage. »
Puisque cette bouée est trouée, sommes-nous définitivement foutus ? Non. Car même si les renouvelables ont un rôle à y jouer, nous connaissons tous et toutes l’élément de base d’un réel changement. Il peut porter plusieurs noms mais désigne une même idée générale : décélération, décroissance, sobriété… Au travers d’exemples concrets, on a cherché à savoir ce que ça pourrait donner. Comme dirait Gébé : « Et c’est pas triste ! »
Extrait d’un article de Nicolas Bérard dans le mensuel l’âge de faire de juin 2024.