Smartphone et transition

… il est un secteur que l’on nous jure « indispensable pour mener la transition » : le numérique. Avec son appareil emblématique, qui est devenu central au sein de notre société : le smartphone. Grâce à lui, l’humain-e moderne (autrement dit l’humain-e hyper connecté-e) peut pratiquer le covoiturage pour limiter ses émissions de CO2, peut « dématérialiser » ses démarches administratives pour économiser du papier, allumer les lampadaires à son passage ou gérer ses radiateurs à distance pour économiser de l’électricité. Bien sûr, la fabrication d’un ordiphone nécessite l’extraction de 183 kg de matières et une bonne quantité d’énergie, dont de l’énergie humaine sous forme d’exploitation, voire d’esclavage.
Mais l’important, nous explique-t-on, c’est que grâce à tous les « petit gestes écolos » que le smartphone rend possibles, les gains environnementaux dépasseront bientôt les dégâts causés par sa fabrication et permettront à notre société de devenir plus « propre ». Revenons à l’idée du départ : un smartphone ne sert à rien, ou quasiment. […] pour qui’il soit réellement « utile », il a besoin, lui aussi, d’une méga-infrastructure. Son carburant à lui, ce sont les données. Son fonctionnement est donc indissociable de l’existence de datacentres qui non seulement stockent, mais surtout gèrent les datas, les analysent, les font passer à la moulinette d’algorithmes afin que la bonne page apparaissent sur le bon écran. Et pour naviguer au milieu de tout ça, il faut des routes : l’ADSL, la fibre optique, les antennes relais et désormais, les satellites.

Toute cette méga-infrastructure est directement adossée à une autre : celle de l’électricité. Au final, comme le rappelle Guillaume Pitron, « compte tenu notamment de sa consommation en eau, en énergie et de sa contribution à l’épuisement des ressources minérales, [le numérique] génère […] une empreinte équivalente à deux ou trois fois celle d’un pays comme la Grande-Bretagne ou la France. Sur le volet énergétique, les TIC consomment environ 10 % de l ‘électricité mondiale, soit l’équivalent de 100 réacteurs nucléaíres ». Et voilà que notre cher président annonce la relance d’un grand plan de construction nucléaire et de prolongation de la durée de vie des réacteurs déjà en fonctionnement, qui pourraient atteindre 60 ans ! Le smartphone n’est pas un outil de la transition, mais bien une catastrophe écologique et sanitaire : c’est tchermobile !

Extrait d’un article de Nicolas Bérard dans le mensuel l’âge de faire de février 2024.

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