Patron-voyou

Même le tribunal l’admet, désormais : leur patron-voyou « a volontairement fait plonger Ecopla ».
Mais oû était, à l’époque, le ministre censé les protéger ?

« Nicholl Food Packaging, pour éponger ses dettes ailleurs qu’en Isère, a volontairement fait plonger Ecopla.
C’est écrit, noir sur blanc. Et ce n’est pas un tract militant. C’est le jugement du tribunal des prud’hommes de Grenoble, rendu le 27 avril dernier.

[…]

À Saint-Vincent-de-Mercuze, en Isère, les Ecopla ciselaient des barquettes en alu depuis des décennies, et avec un carnet de commandes bien rempli. Mais au printemps 2012, on croisait
Christophe à Grenoble, à la Bourse du Travail : « On a fait appel à un expert-comptable, et c’est lui qui a découvert que six millions d’euros étaient partis en Angleterre. Ils ont sucé notre trésorerie. Ils nous ont mis dans le rouge. » A l’époque. « Ils », c’étaient des fonds anglo-saxons. Puis l’usine fut revendue au « Chinois », Jerry Ren, un actionnaire sino-australien.
En janvier 2015, on recroisait Christophe : « C’est le déclin complet. Le stock de métal diminue. Le Chinois ne paie plus l’Urssaf… » Face à la cata annoncée, Christophe et la centaine de salariés (à peu près, de mémoire) avaient fait des pieds et des mains. Tout essayé. Frappé à toutes les portes. Dont la nôtre. Dont, aussi, évidemment, le ministère de l’Économie.

Des lettres lui sont adressées. Par les ouvriers, directement. Par le député socialiste de l’Isère, Pierre Ribeaud. Par le président du Conseil régional Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez. Par les dirigeants de la filière France-Aluminium. Par la sénatrice communiste de l’Isère, Annie David.

[…]

Mais rien n’est venu. Aucune « mesure », ni « concrète », ni « rapide ». Pas même des réponses de courtoisie. Le ministre de l’Économie est resté aux abonnées absents.

[…]

Cent fois, comme ministre, il aurait pu intervenir. Sauver ce fleuron. Mais il n’avait pas bougé le petit doigt. Pourquoi ? on s’était demandé.
Parce que, pour lui, même voyous, les patrons ont toujours raison. Les ouvriers doivent rester ouvriers, ne pas se mêler des affaires sérieuses de l’entreprise… et encore moins prétendre la diriger !
Parce que, l’industrie, de toute façon, pour lui, C’est un truc du passé, dépassé. La France comme start-up nation.

Parce que, aussi, il n’avait pas la tête à ça. On le devinait. Sauver une centaine de familles, bof. « Ministre de l’Économie », il ne l’était que sur le papier, déjà tout à ses ambitions présidentielles…
C’était un soupçon, une intuition.
C’est désormais un fait avéré.

Extraits d’un article de François Ruffin et Cyril Pocréaux dans le journal Fakir de juillet-août 2018.

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