MaPrimeRénov, de la com, aucune efficacité

« Pouvez-vous citer une action réelle, forte, déterminante, qui ne soit pas juste de la com’, que vous menez pour l’écologie ? »
À cette question posée par un internaute, Emmanuel Macron répond fièrement dans une vidéo postée sur YouTube : « On a rénové plus d’un million de logements d’un point de vue thermique grâce à MaPrimeRénov. » Le chiffre n’est pas faux. Mais cette affirmation présidentielle résonne pourtant comme de la com’.
La suite des propos tenus parle président de la République est autrement plus intéressante : « Il y a des rénovations complètes et intégrales, elles sont beaucoup moins nombreuses. » Le diable se cache dans les détails. Parce que le million de rénovations annoncé se réduit comme peau de chagrin quand on s’intéresse aux rénovations dites « complètes et performantes ». MaPrimeRénov soutient essentiellement des rénovations « mono-gestes » : de janvier 2020 à juin 2021, 86 % des demandes de primes accordées sont constituées de mono-gestes, seulement 72 % correspondent à deux types de travaux simultanés, et 3 % à trois types de travaux simultanés ou plus », souligne un rapport de France Stratégie.
Ces gestes uniques ne sont que très peu efficaces. Une enquête sur la rénovation des maisons individuelles menée par l’Observatoire national de la rénovation énergétique l’illustre. Les travaux touchant à cinq gestes ou plus sont six fois plus efficaces que les mono-gestes. Mais ce n’est pas le seul défaut de cette politique du chiffre. « Les gens ne font pas des travaux de rénovation au compte-gouttes. Une fois qu’ils en ont fait, ils n’en font plus pendant plusieurs années. Donc les petites rénovations de MaPrimeRénov bloquent
la mise en place de travaux plus structurels parla suite. Et ça, c’est embêtant », souligne Michel Colombier, membre du Haut Conseil pour le climat (HCC).

Une réalité d’autant plus gênante que la France reste loin de ses objectifs sur la rénovation des logements. Une note de l’Institut du développement durable et des relations internationales (lddri), datée du printemps 2022, souligne ainsi que, « en dépit du fait que le secteur des bâtiments est celui pour lequel la stratégie nationale bas carbone prévoit la réduction des émissions la plus rapide à moyen terme, les politiques peinent à atteindre leurs objectifs.
Le secteur présente le plus grand écart par rapport à la trajectoire du premier budget carbone (+ 74,5 % par rapport à la trajectoire cible sur 2015 et 2018). Et de conclure : « L’ambition consensuelle d’accroître le nombre de rénovations énergétiques ne se traduit pas en résultats probants. »
Au 1er janvier 2022, 5,2 millions de résidences principales (soit 17 % du parc) étaient encore des passoires thermiques. À peine quelques milliers – 2 500 selon la Cour des comptes – sortent annuellement de ce statut grâce à MaPrimeRénov.
Pour atteindre ses objectifs, tous les acteurs le disent, la France doit « changer d’échelle » en axant les politiques publiques vers des rénovations performantes. Il faut ainsi passer « d’environ 70 000 rénovations globales effectuées » par an (la moyenne sur la période 2012-2018) « à 370 000 par an après 2022 et 700 000 par an à partir de 2030 », note France Stratégie.

Début d’un article de Pierre Jequier-Zalc dans Politis du 15 décembre 2022.

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