Le business des migrants

… à Lampedusa les centres d’accueil des migrants sont gérés par des sociétés privées, sur délégation de l’État, sociétés qui emportent depuis des années les appels d’offres et sur lesquelles la mafia a la mainmise.
Chaque migrant rapporte 30 euros par jour, ils sont des milliers. Un mafieux mis sur écoute confiait que ce business est plus rentable et moins dangereux que celui de la drogue, hommes et femmes fournissant ensuite une main-d’œuvre docile dans les champs, sur les chantiers ou sur les trottoirs.
Passeurs et mafieux ne font cependant que profiter, pour leurs trafics, d’une politique européenne qui non seulement ne se soucie pas des conditions dans lesquelles s’effectuent les déplacements de la misère et de la peur, mais suscite elle-même ces déplacements en soutenant des régimes corrompus ou despotiques, et en organisant l’économie de l’Afrique exclusivement selon ses propres intérêts (cf. l’accord de partenariat économique de 2013, qui interdit aux pays africains signataires de taxer les produits importés de l’UE, mettant l’agriculture vivrière locale en concurrence avec l’agriculture européenne).
C’est ainsi que l’on fabrique des migrants dont beaucoup arriveront finalement à se faufiler chez nous car nous les demandons. Ils ne viendraient pas ici s’ils ne savaient pas qu’ils y trouveront du travail. Clandestin, ultra-précaire et sous-payé, certes, mais c’est toujours mieux que le cachot, la gamelle vide ou la tombe.

Extrait d’un article de Jean-Marie Laclavetine dans le journal Siné mensuel de mai 2015

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