Pourquoi vous devriez vous informer autrement ? La réponse dans cette vidéo.
Israël, Palestine, le double standard médiatique
Pressé par Daniel Schneidermann de se prononcer sur le double standard qui structure le traitement médiatique de la question palestinienne – très largement documenté -, l’animateur en récuse purement et simplement l’existence :
– Daniel Schneidermann : Mon sentiment […] C’est que les 45 O00 morts palestiniens à Gaza n’ont pas été pleurés, célébrés de la même manière que l’ont été les 1 200 morts israéliens du 7 octobre. Voilà, est-ce que sur ce point on peut tomber d’accord ?
– Guillaume Emer : Mais pas du tout !
– Daniel Schneidermann : Pas du tout ?
– Guillaume Emer: Mais pas du tout !
Après le déni, l’autocélébration ? Alors que la question portait sur les médias audiovisuels en général, Guillaume Erner l’esquive en mentionnant son cas particulier – irréprochable, forcément. La stérilité de l’échange donne très vite sa mesure. Lorsque Daniel Schneidermann interroge par exemple le matinalier sur son interview du journaliste palestinien Rami Abou Jamous, au cours de laquelle Erner reprit des éléments de la propagande israélienne dans 10 questions (sur 23), ce dernier allume immédiatement un contre-feu en mobilisant une des armes favorites de l’éditocratie contre la critique d’lsraël et de ses relais médiatiques : « ASI ne s’interèsse à mes émissions que lorsque je traite de la question israélo-palestinienne. Il y a, vous voyez, une judéo-obsession chez ceux qui font ça. »
Ou encore, plus tard :
Guillaume Erner : Je pense que s’il y a quelque chose d’ïnoui qui devrait réveiller Daniel Schneidermann la nuit tous les jours […] cette chose-là extrêmement importante c’est, si vous voulez, les milliers et millions de musulmans qui sont aujourd’hui persécutés dans des régions dont personne ne parle, dont tout le monde se fout, je pense évidemment en premier lieu aux Ouighours et en deuxième lieu aux Rohingyas. C’est ce qu’on appelle la tache aveugle. S’il y avait une sincérité… Darwich, dans un vers dit finalement que la seule raison pour laquelle on s’intéresse aux Palestiniens […] c’est parce qu’ils ont comme ennemi les juifs.
Quand les musulmans ont comme ennemi les Chinois ou les Birmans, on s’en tape et personne n’en parle, sauf France Culture.Si l’on ne peut que déplorer l’absence effective d’information sur les peuples opprimés cités par Erner, on ne voit pas bien en quoi, d’une part, cette invisibilisation permettrait d’invalider les carences médiatiques (bien réelles) du traitement médiatique sur la situation à Gaza, notamment au regard des standards de médiatisation fixés par les rédactions en chef au lendemain du 7 octobre 2023. D’autre part, à notre connaissance, le désintérêt des chefferies médiatiques pour les Ouïghours et les Rohingyas ne va pas de pair avec l’expression d’un « soutien inconditionnel » à leurs oppresseurs chinois et birmans sur les plateaux de télévisions, ni n’est l’occasion d’un déferlement d’expressions racistes et déshumanisantes, comme ce fut le cas à l’endroit des Palestiniens des mois durant. L’un dans l’autre, recourir à l’un des plus ardents défenseurs de l’autodétermination du peuple palestinien, en la personne du poète Marhmoud Darwich, pour assimiler la critique du « deux poids, deux mesures » à un impensé antisémite relève, à tout le moins, d’un profond égarement.
Extrait d’un article dans Médiacritique(s), magazine trimestriel d’Acrimed, d’avril 2025.