Contre tous les terrorismes

En attendant, le plus grand producteur d’antisémitisme reste naturellement l`État ethno-colonial israélien. Tous les professeurs dans les banlieues françaises, toutes les militantes et tous les militants associatifs des mêmes quartiers, savent combien il est difficile aujourd’hui de mobiliser contre l’antisémitisme quand, de toute évidence, il y a un gigantesque « deux-poids, deux mesures ». Même quand des journalistes relatent les libérations d’otages, il y a encore ce déséquilibre : en effet, ils se réjouissent de la libération conjointe des « otages israéliens et des prisonniers palestiniens », Mais quand, sans même parler des exécutions extra-judiciaires qu’il pratique de manière permanente, l’État israélien arrête en Cisjordanie des Palestiniennes, y compris mineur-es, sans inculpation, sans procès, pour des durées indéterminées, de quoi s’agit-il ? Il s’agit d’otages qui servent à Israël d’instrument de pression permanente sur les familles des prisonniers. Quant aux prisonniers en bonne et due forme, ont-ils eu droit à un procès équitable ? Poser la question, c’est y répondre. Or un million de Palestiniens ont déjà été arrêtés depuis la première intifada. 20 % de la population palestinienne est-elle « terroriste » ? Aujourd’hui, quand Netanyahou consent à des trêves, il y a des échanges d’otages, point barre.

Mais le producteur massif d’antisémitisme qu’est l’État d’Israël n’a-t-il pas ses relais en France ? Quand des associations juives, surtout ce Conseil qui se dit « représentatif des institutions juives de France », ont adopté depuis des années une orientation de soutien inconditionnel à la politique israélienne, même dirigée par un gouvernement suprémaciste d’extrême droite, ce sont elles qui établissent l’équation « Juif = colon israélien » et facilitent le passage à l’antisémitisme. Quand Michèle Alliot-Marie, ministre de la Défense (2002-2007) accusa odieusement la campagne BDS (Boycott Désinvestissement Sanctions) d’appeler à « boycotter les produits casher », elle pratiqua cyniquement l’équation « boycott de produits israéliens = boycott de produits juifs », donc « hostilité à la politique israélienne = hostilité aux Juifs ». Là encore, elle favorisa l’antisémitisme, fut-il « des imbéciles », poussant ces derniers à être hostiles aux Juifs en général.

Ce que fait et s’apprête à faire Netanyahou aujourd’hui à Gaza est parfaitement comparable à ce que firent les nazis au ghetto de Varsovie : déshumanisation totale d’une population, massacres des civils, famine, soif, épidémie. On ne choisit pas, certes, un terrorisme contre un autre. Cependant, si nous ne soutenons pas le Hamas, nous soutenons le mouvement national palestinien, y compris, à mon avis, le droit du Hamas d’être inclus dans des négociations. Plus généralement, il faut chercher à regrouper les courants anticolonialistes sur une orientation internationaliste, indépendante des objectifs et des méthodes d’organisations telles que le Hamas ou le Fatah, sans évidemment renvoyer dos-à-dos colonisateur et colonisés : c’est sur une telle orientation qu’il sera possible de regrouper le maximum de forces, que ce soit dans les pays impérialistes, dans les pays dominés et plus particulièrement au Moyen-Orient.

Dernière partie d’un article de Michel Cahen dans le mensuel de la Gauche Démocratique et sociale de décembre 2023.

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