Blanquer, le conservateur

Si le torpillage des principes de la laïcité est une des marottes favorites du ministre de l’Éducation nationale, il a d’autres obsessions en stock. En particulier, la lutte contre l’intersectionnalité. C’est-à-dire contre le fait d’ « analyser la réalité sociale en observant que les identités sociales se chevauchent et que les logiques de domination sont plurielles » – manière de rappeler qu’une PDG blanche et sa femme de ménage d’origine africaine ne subissent pas tout à fait les mêmes formes de domination.

Sur le terrain, ça donne un ministre de l’Éducation nationale qui tape comme il peut sur l’Unef (again) et ses réunions en non-mixité raciale : pour Blanquer, que des personnes victimes de racisme veuillent échanger entre elles à ce sujet est au mieux « une chose folle », au pire le terreau de « projets politiques gravissimes » (BFM, 19/03/21).

Après la race, le genre : le 5 mai dernier, le ministre proscrivait l’usage à l’école de l’écriture inclusive basée sur le point médian. En introduction de sa circulaire, il avait cru bon de placer une citation d’Hélène Carrère d’Encausse et Marc Lambron (deux pontes de l’Académie française) affirmant que cette graphie serait « contre-productive » pour « la lutte contre les discriminations sexistes ». Ben voyons!

Cohérent, Blanquer inaugure finalement début janvier un colloque à la Sorbonne intitulé « Après la déconstruction : reconstruire les sciences et la culture », bâchant entre autres le « néoféminisme » et la « pensée » décoloniale. Une bamboche pseudo-universitaire financée par le ministère sur un fonds réservé.

Lâcher des ronds quand ça sert ses croisades ? Décidément, le ministre sait faire. Notamment en filant du blé à un syndicat lycéen chargé de promouvoir ses réformes iniques. On rembobine. En novembre 2020, une enquête de Mediapart révèle que l’Éducation nationale a rincé à hauteur de 65 000 € le syndicat Avenir lycéen, qui en claquera une proportion significative en restos et hôtels de luxe. Libération découvre dans la foulée que l’idée de la création du syndicat a en réalité « germé [en 2018] rue de Grenelle » pour « servir la communication » de Blanquer, alors que dans la rue, les lycéens qui manifestaient contre la réforme du bac et la création de Parcoursup se faisaient dégommer à coups de flash-ball.

Extrait d’un dossier sur les précaires de l’Éducation nationale dans le journal CQFD de février 2022.

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