Assistanat et argent public

Le 10 octobre dernier, la chambre régionale des comptes (CRC) d’Auvergne-Rhône-Alpes a publié un rapport tout à fait accablant sur les dépenses de communication de cette région dirigée par la droite, à l’époque où elle était présidée par Laurent Wauquiez (Les Républicains) – lequel est par ailleurs, comme nous le savons, l’infatigable pourfendeur de ce qu’il appelle, dans un style où se reconnaît tout à plein le pire du pire de la méchanceté droitarde, « le cancer de l’assistanat ».

Le jour même où ce rapport était publié, Le Figaro du groupe Dassault, qui de son côté (et lorsqu’il n’est pas occupé à encaisser les millions d’euros d’aides publiques à la presse qui lui sont très libéralement distribués chaque année) ne manque jamais une occasion d’exiger des baisses des impôts et une réduction de « la dépense publique », a consacré à ce document « particulièrement sévère » un premier article soulignant, avec beaucoup de justesse, qu’il  » épinglait plus particulièrement des frais de communication largement organisés autour de la personne de Laurent Wauquiez, candidat potentiel de la droite à la prochaine élection présidentielle, comme, par exemple, des « repas dispendieux ».

Puis, quelques jours plus tard, Le Figaro est plus longuement revenu sur cette affaire dans un nouvel article narrant que « l’opposition » régionale « socialiste [voulait] connaitre le détail » des coûteux « frais de bouche de Laurent Wauquiez » qui ont étonné la CRC. Plus précisément, ce papier, citant ses opposant-es de gauche au sein de l’exécutif régional qui dénoncent des « additions exorbitantes », rapportait que Wauquiez avait notamment dépensé « 5140 euros pour un déjeuner d’affaire avec trois journalistes de Valeurs actuelles, 2148 euros pour un repas avec Michel Houellebecq », et « 360O euros pour un diner avec quatre membres du Conseil d’État ».

Cet article du Figaro, dont l’auteur balançait au passage ses petits camarades réacs de Valeurs actuelles, était, reconnaissons-le, presque parfait. Mais il y manquait tout de même cette amusante information, qui se trouve à la page 60 du rapport de la chambre régionale des comptes : le 14 avril 2023, Laurent Wauquiez et « son conseiller » ont déjeuné avec trois journalistes du… Figaro. Coût de ces agapes : 1740 euros. Soit, tout de même, près de 350 euros par tête de pipe. Payées par les contribuables, qui n’ont bien sûr jamais été consultés-es par Laurent Wauquiez sur l’utilité d’une telle dépense.

Et certes : c’est une coquette somme. Mais positivons : l’essentiel, après tout, est que Le Figaro, lorsqu’il ne fait pas payer par une collectivité locale les opulents repas de ses journalistes, continue courageusement son fier combat contre « la dépense publique ».

Article de Sébastien Fontenelle dans Politis du 24 octobre 2024.

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