Antisémitisme et racisme

En politique, la lutte contre l’antisémitisme semble n’être qu’un outil dans le terrain d’affrontements entre partis. Lorsque la lutte contre l’antisémitisme est assimilée à la défense des valeurs de la république, elle repose sur des valeurs morales abstraites.
On l’a bien vu quand Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher ont appelé à la marche du 12 novembre au nom des « valeurs de notre République » – ce qui sonne aujourd’hui comme un dog whistle islamophobe. Pour eux, les juifs sont une abstraction. Or la lutte contre l’antisémitisme, c’est la défense de personnes, de vies. Quand Darmanin interdit les manifestations pour les Palestiniens et traite les manifestants d’antisémites, et quand Mélenchon dit que la marche contre l’antisémitisme revient à soutenir le massacre à Gaza, tous deux mettent des populations en concurrence. Ce faisant, l’un comme l’autre mettent en danger les vies des juifs et des Arabes en France.

Comment tes ami-es et toi avez-vous réagi au moment de cette marche ?

Si j’ai pu comprendre le malaise des individus à marcher le 12 novembre, je n’excuse pas la partie de la FI qui a appelé à ne pas s’y rendre. Ce sont les gauches qui devraient mener la lutte antiraciste. En un sens, la gauche en France naît avec l’affaire Dreyfus, quand elle rompt avec l’extrême droite dans sa critique du capitalisme, et qu’on voit surgir l’antiracisme ouvrier et syndicaliste révolutionnaire. En refusant de participer à la marche, LFI a renoncé à ce rôle historique.
Ce n’est pas nouveau. Déjà, en 2006, le Mrap et la LCR avaient refusé de marcher pour Ilan Halimi au prétexte que l’extrême droite avait annoncé sa présence. En 2012, après la tuerie de l’école Ozar Hatorah, pas de marche. Pour l’Hyper Cacher en 2015, le meurtre de Mireille Knoll en 2018… À chaque fois, les juifs sont seuls. Mais pour nous, la question de marcher contre l’antisémitisme était une évidence ; la question était : comment redonner du sens à cette marche ?

La présence de l’extrême droite posait tout de même question…

Elle représentait quelques centaines de personnes au milieu de 100 000 manifestants. Et quand bien même, depuis quand la gauche laisse-t-elle le pavé à l’extrême droite ? Là aussi, elle renonce à son rôle historique. À quel moment la gauche se réempare de la conflictualité dans la lutte antiraciste ? La lutte contre l’antisémitisme, c’est conflictuel.

Extrait d’un dialogue dans le mensuel CQFD de janvier 2024.

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