Aliénés par la technique

Il faut bien comprendre, en effet que, parce que la technique nous offre le confort, elle nous libère de l’effort.
Voilà pourquoi nous nous laissons aliéner par les machines et les technologies (informatique, smartphone, voiture…), mais aussi les méthodes immatérielles (organisation, management, publicité, virement…).
Si nous sommes ainsi aliénés, explique Ellul dans Les nouveaux Possédés (1973), c’est d’abord par notre propre compulsion à consommer des produits que ceux qu’on appelle riches, bourgeois ou dominants, ne consomment pas. Pas d’Ipad ni de soda pour les enfants Zuckerberg !
Oui, la technique s’est imposée à nous comme une impérieuse nécessité, un doux diktat. Des siècles durant, elle n’était qu’un ensemble de moyens destinés à atteindre une fin. Désormais, elle constitue une fin en soi. Elle façonne nos imaginaires, le marché, la finance et le politique. Elle s’est emparée de nos consciences et, de ce fait, échappe à notre contrôle.
« On n ‘arrête pas le progrès », non pas parce qu’on ne peut plus le faire, mais parce qu’on ne veut plus le faire.

J’aurais pu intituler cet article « et si le problème n’était pas le capitalisme, mais la technique ? », en omettant d’évoquer cet empire de la technique. C’eut été une erreur.
Car ce n’est pas la technique seule qui est coupable. Sinon, il suffirait de « choisir le modèle Amish », comme dit l’autre. Non, le souci, c’est la sacralisation de la technique.
Dans Le bluff technologique (1988) Ellul écrit : « c’est enfantin de dire que l’on est contre la technique ; aussi absurde que de dire que l’on est opposé à une avalanche de neige ou à un cancer. »
Car « ce n ‘est pas la technique qui nous asservit mais le sacré transféré à la technique, qui nous empêche d’avoir une fonction critique et de la faire servir au développement humain.

Extrait d’un article de Jean Tiberi dans le Low tech journal de mars 2024.

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