Alain Minc, marxiste

L’agence de notation Standard and Poor’s (S&P) n’a donc pas dégradé la note de la France. […]

C’est la réforme des retraites qui a sauvé la réputation du pays. Non seulement il faut tenir bon, en jouant par exemple d’un ultime subterfuge pour empêcher un vote hostile des députés, mais il faut poursuivre dans cette voie et montrer que la France est bien tenue, malgré les resquilleurs au RSA, les chômeurs qui ne veulent pas travailler et les immigrés qui profitent de notre générosité. Contre ceux-là, la « main de la France » ne tremble pas. Voilà sans doute ce que le ministre a plaidé le 17 mai devant l’état-major de S&P. Et il nous le dit : pour mériter la confiance des marchés, il faudra tailler massivement dans les dépenses publiques. […]

La façon dont Bruno Le Maire a balayé d’un revers de main la proposition de l’économiste Jean Pisani-Ferry d’un impôt « exceptionnel et temporaire sur le patrimoine financier des 10 % de ménages les plus aisés » pour financer la transition écologique en dit long sur le caractère idéologique de la politique gouvernementale. Dès que l’on dit « impôt », le ministre brouille les pistes. On lui parle de Bernard Arnault, il nous parle de la caissière du supermarché. Pour protéger le premier, il tente d’effrayer la seconde. Pisani-Ferry, pourtant proche de Macron, dont il inspira le programme en 2017, a cette remarque de bon sens : « ll s’agit de convaincre les Français de ce que la charge est équitablement répartie. »
On en est loin. Pire ! Une étude publiée le 6juin par l’institut des politiques publiques confirme que plus les ultra-riches sont riches, moins ils contribuent à l’impôt. La démarche du gouvernement n’y est pas pour rien. On ne sait d’ailleurs pas de quelle boîte à malice budgétaire la transition écologique va surgir. Il ne faudrait pas que S&P serve à déresponsabiliser le gouvernement devant ses propres choix. C’est-à-dire à vider notre démocratie.
Dans le genre arnaque intellectuelle, voici aussi Alain Minc, Financier prêchant pour sa paroisse, il nous invite à prendre en pitié les fonds de pensions. « Ce sont, dit-il, les instituteurs de Californie, les ouvriers du Michigan, les employés du bâtiment britanniques » qui confient leurs retraites à des gestionnaires.
Quand nous combattons la réforme des retraites, ce sont donc nos « camarades » que nous volons. Vision aussi cynique que réductrice. On pourrait méchamment faire observer que ce sont les risques du système de retraite par capitalisation. Celui vers lequel veulent nous conduire MM. Le Maire et Macron. Mais les fonds de pension, ce sont surtout des financiers qui spéculent sur les économies des retraités captifs d’un système à haut risque. Cette touchante solidarité avec les pensionnés du capitalisme anglo-saxon, c’est le côté « marxiste » d’Alain Minc, comme il aime à le rappeler. Minc est un « marxiste » du genre de Warren Buffet, ce multimilliardaire qui se plaît a affirmer : « La lutte de classes existe, la preuve, c’est nous qui l’avons gagnée. »

Extrait d’un article de Denis Sieffert dans Politis du 08 juin 2023.

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