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Libéralisme autoritaire
Selon l’auteur de L’Énergie de l’État. Pour une sociologie historique et comparée du politique (La Découverte, 2022), Emmanuel Macron s’inscrit dans un courant politique hérité du XIXe siècle : le « national-libéralisme ». « Ce concept renvoie à la tension entre l’État-nation et le système capitaliste international. Il désigne la triangulation entre l’emprise du capitalisme sur les populations, l’universalisation de l ‘État-nation comme forme de domination légitime et la généralisation d’une conscience politique nationaliste. Emmanuel Macron est exemplaire de cette triangulation », explique le chercheur. Entre la fascination pour le Puy du Fou et le « sommet de l’attractivité » Choose France, la tension est, pour Jean-François Bayart, « surmontée parle recours massif et systématique à la répression. »
De quoi dessiner les contours de l’idée de démocratie dans la tête d’un président qui, tient à rappeler le professeur, n’avait jamais eu la moindre expérience électorale avant d’être élu en 2017, face à Marine Le Pen. Une forme démocratique posée sur le socle d’un libéralisme autoritaire, que le philosophe Grégoire Chamayou donne à comprendre dans son ouvrage La Société ingouvernable. Une généalogie du libéralisme autoritaire (La Fabrique, 2018). L’auteur défriche l’origine d’un concept qui théorisait la nécessité, pour une économie libérale, de s’appuyer sur un État vertical et autoritaire.
Dans ce système, la démocratie sert de paravent. Elle est un cadre légitime au sein duquel règne l’ordre capitaliste, débarrassé des contre-pouvoirs et des protestations populaires. Et ne tient debout que par le rituel électoral.
Face à cet acharnement à ne pas considérer la légitimité démocratique de la contestation, il est intéressant de noter la passion que voue Emmanuel Macron aux dites « conventions citoyennes ». Une « innovation démocratique » qui peut « refroidir les passions brûlantes » dans un « moment de trouble », disait-il, le 3 avril, face aux membres de la convention pour la fin de vie. Cette participation citoyenne, telle que le président l’a organisée, s’inscrit pourtant dans un cadre choisi par l’exécutif, conseillé par d’onéreux cabinets privés, et débouche sur des propositions qui ne sont reprises que lorsqu’elles conviennent au pouvoir. Une forme « d’autoritarisme participatif », comme le formule le maître de conférences en science politique Guillaume Gourgues dans « Les faux-semblants de la participation« , un article paru dans La Vie des idées. Cette technique gouvernementale, rappelle-t-il, est beaucoup utilisée en Russie et en Chine. De belles références en matière de démocratie.
Dernière partie d’un article d’Hugo Boursier dans Politis du 25 mai 2023.