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Le massacre de Thiaroye
Longtemps éclipsé de la mémoire collective, le massacre de Thiaroye, en décembre 1944, apparaît aujourd’hui non plus comme un enchaînement malheureux de circonstances fortuites ayant mené à un dénouement mortel mais bien comme la conséquence d’une politique raciste consciente qui a été volontairement dissimulée. L’historienne Armelle Mabon continue son combat contre l’oubli et pour la vérité.
Le 2 septembre 1939, au lendemain de l’invasion de la Plogne par l’Allemagne nazie, la mobilisation est décrétée en France. Plus de 200 000 hommes originaires des colonies sont incorporés dans les troupes coloniales entre 1939 et 1940. Ces « soldats indigènes », comme on les appelle, représentent alors un peu plus d’un quart du total des forces de l’armée française. Bien qu’essentiellement cantonnés dans les colonies, Algériens, Marocains, Malgaches, Indochinois, « Sénégalais » (les tirailleurs sénégalais sont en fait originaires de toute l’Afrique sub-saharienne) paieront un lourd tribu malgré une faible présence numérique sur le sol hexagonal. Selon les chiffres officiels, sur les 40 000 tirailleurs sénégalais engagés dans les combats en métropole, près de 17 000 sont tués, disparus ou blessés au combat en 1940.
Les troupes coloniales sont massivement incorporées dès 1942 dans les Forces françaises libres (FFL). Elles sont de tous les combats : en Syrie et au Liban en 1942, […] libèrent Toulon et remontent la vallée du Rhône jusqu’en Alsace à Colmar.
Progressivement ces troupes sont remplacées par des ex-FFI, officiellement pour leur épargner les rigueurs de l’hiver continental. En réalité, à l’approche de la Libération, le blanchiment des troupes françaises est en marche.Dans le même temps, le gouvernement provisoire organise le retour des « soldats indigènes » faits prisonniers lors des combats […]
Les soldats indigènes libérés après quatre années de captivités sont aussitôt démobilisés avant leur retour dans les colonies. Dès le mois d’octobre 1944, ils se voient appliquer un régime particulier sur demande du général Ingold, directeur des troupes coloniales. Durant leur séjour sur les sols métropolitains, ils sont « réunis », d’autres diront « enfermés », dans des « centres de transit des troupes indigènes coloniales (CTTIC) » au sein desquels ces soldats sont « séparés par « race » « . La ségrégation raciale est non seulement spatiale mais également financière : les rappels de solde ne sont pas entièrement versés, voire pas du tout.
Le 5 novembre, une partie des anciens tirailleurs refuse d’embarquer à Morlaix avant que leur solde ne leur soit entièrement versée. Ces 315 insoumis échappent ainsi au massacre à venir. […]
Extraits d’un article dans Alternative Libertaire de décembre 2024, au sujet du livre Le massacre de Thiaroye de l’historienne Armelle Mabon. Son livre dévoile également comment un mensonge d’État peut perdurer en faisant taire les universitaires.