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Besoins névrotiques
Par la publicité, le capitalisme vise à inciter à la consommation infinie des masses, afin de tenter de satisfaire deux besoins névrotiques principaux : celui d’être reconnu et celui de posséder. Ces besoins sont engendrés par la peur de ne pas être aimé et d’être faible.
Les élites capitalistes cherchent le pouvoir maximum par le biais de l’accumulation du capital, tandis qu’elles poussent les masses à la possession sans fin. Mais ces dernières, comme pour les élites économiques et politiques, sont aussi dépendantes du besoin de reconnaissance. La valeur centrale de la société capitaliste est le pouvoir par l’accumulation du capital, c’est à dire le culte de la marchandise pour les masses et le pouvoir économique pour les élites, grâce à la propriété privée des moyens de production. Ce dernier étant le principe fondateur du capitalisme permettant le pouvoir adémocratique des élites économiques sur la société politique, donc sur le social et l’écologie. […]
Consommer et posséder vise aussi à compenser un manque d’estime de soi. Le sociologue Veblen Thorstein qualifie de « consommation ostentatoire » l’acte de consommer pour se sentir exister par le regard des autres, qu’on imagine envieux et admiratif. Le consommateur cherche à montrer aux autres, ou à lui-même, que s’il possède certains biens, c’est parce qu’il dispose d’un capital économique ou culturel important. Par conséquent, il attend des autres une reconnaissance sociale de sa puissance économique ou de sa distinction culturelle. En effet, le besoin de consommer pour paraître vise à compenser des carences identitaires. Le besoin de reconnaissance sociale repose sur un manque d’estime de soi, donc un besoin d’être aimé pour sa force, qui repose sur la peur d’être faible et de ne pas être aimé suffisamment.
Le besoin de possession et d’accumulation est quasiment illimité chez certains milliardaires, qui accumulent plus qu’ils ne pourront jamais consommer ou dépenser. Car le ressort profond de leurs besoins réside sur une volonté de puissance qui s’exerce par la quantité de la consommation et de possession d’entreprises, la détention d’un très gros compte en banque, des plus gros revenus possibles par rapport aux autres élites économiques et politiques. Ce besoin de puissance est lui-même le signe d’un complexe d’infériorité explique le psychanalyste Alfred Adler, donc d’une peur d’assumer sa part de fragilité. […] La sécurité matérielle relève des besoins essentiels physiologiques (de se nourrir et de se loger), mais aussi de posséder des technologies puissantes et multiples. Ces dernières visent à être en capacité de faire face à tous les besoins et problèmes éventuels, grâce à des instruments, à la technologie (automobile, ordinateur, outillage), mais aussi le besoin névrotique de connaissance.
Ce dernier relève de la peur de ne pas maîtriser par incompréhension, et conduit notamment à des achats compulsifs et infinis de livres que le consommateur n’aura jamais le temps de lire. Plus le consommateur possède d’instruments, plus il peut maîtriser le monde qui l’entoure, plus il se sent fort. Moins il en possède, plus il craint d’être fragile, donc plus il craint l’insécurité, l’impuissance économique, donc la peur d’être faible. […]
À la différence des populations ne parvenant pas à se nourrir à leur faim, le besoin de possession repose surtout, pour les classes moyennes, sur une peur de manquer plus fantasmée que réelle. Le fait de posséder des richesses, des biens à profusion, rassure les personnes qui se sentent éternellement en danger de tomber un jour dans la précarité économique. […]
La simplicité volontaire vise ainsi à se détacher de la peur de manquer. Les membres du mouvement pour la « simplicité volontaire » apprennent à vivre heureux avec de faibles moyens, grâce à des joies et des activités simples.
Extraits d’un article de Thierry Brugvin dans le journal Les Zindigné(e)s de mars 2016.