Le virus du libre-échange

Au début de la pandémie de Covid-19, il ne manquait aucun dirigeant politique pour promettre qu’à la mondialisation incontrôlée succéderait un processus de relocalisation des « activités stratégiques ». Quelques semaines plus tard, c’est à se demander si la « relocalisation » n’est déjà plus qu’une promesse enterrée.

Fin avril, la Commission européenne annonçait un nouvel accord de commerce et d’investissement avec le Mexique visant à faciliter l’importation de produits agricoles et d’énergies fossiles. En mai et juin, ses équipes négociaient avec la Nouvelle-Zélande et l’Australie pour importer toujours plus de viande. Début juillet, la Commission annonçait avoir « terminé le nettoyage juridique » de l’accord avec le Mercosur afin que la ratification puisse débuter à l’automne. En août, c’est l’accord avec le Vietnam qui entrait en application.

Du côté de l’Élysée, Emmanuel Macron, alors qu’il avait promis de reprendre « sans filtre » les propositions de la Convention citoyenne pour le climat, a écarté sans ménagement sa proposition de ne pas ratifier le CETA et de renégocier son contenu. Après avoir essayé de faire voter cet accord en procédure accélérée, et en catimini en plein été 2019, voilà qu’il fait tout ce qu’il peut pour éviter que le sujet ne revienne à l’ordre du jour ; il prolonge ainsi cette situation complètement extravagante où le CETA s’applique de façon provisoire depuis trois ans alors que le processus de ratification n’a toujours pas été mené à son terme, ni en France ni au sein de l’UE.

Et sur le Mercosur ? Devant la Convention citoyenne pour le climat, E. Macron a prétendu avoir « stoppé net » les négociations ; il n’en est pourtant rien. Paris n’a toujours pris aucune initiative pour bloquer cet accord. Le collectif Stop CETA-Mercosur vient ainsi d’appeler E. Macron « à faire à Bruxelles ce qu’il dit publiquement à Paris », à savoir « stopper net cet accord en construisant une minorité de blocage au sein du Conseil de l’UE ».

Alors que la pandémie de coronavirus révèle au grand jour les fragilités économiques, sociales et sanitaires engendrées par la mondialisation néolibérale et productiviste, à Bruxelles et Paris, on veut en sauver le principe, en insérant toujours plus d’entreprises, d’activités et d’emplois dans les chaînes d’approvisionnement mondiales. Il est temps de les arrêter.

Article de Maxime Combes dans Lignes d’attac d’octobre 2020.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *